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Entrevue avec Myriam Verreault

Jeudi, 3 octobre 2019

Après avoir été présenté au Festival international du film de Toronto en première mondiale, et avoir fait la manchette en remportant le Grand Prix de la compétition long métrage du Festival de cinéma de la Ville de Québec, Kuessipan sort en salle demain, vendredi. Voir les horaires du film. Produit par Félize Frappier (Max Films Média) et distribué par Filmoption International, Kuessipan est réalisé par Myriam Verreault, qui a coscénarisé le film avec Naomi Fontaine, auteure du roman éponyme. Lors de notre rencontre avec la cinéaste, nous avons fait appel à ses souvenirs pour revenir sur chacune des étapes de cette production atypique qui dura sept ans.

Rencontre avec Naomi Fontaine

“Je recherche de la littérature innue parce que je veux faire un film à Maliotenam, mais je ne me sens pas la légitimité de le faire seule. Au salon du livre de Wendake, dans le temps des fêtes, en 2011-2012, Naomi est derrière sa table, elle vend son livre “Kuessipan” et dédicace ma copie avec ces mots que je n'oublierai jamais: “pour la poésie qui créé des histoires”. C’était prémonitoire. Je lis, je dévore, je comprends l’ambiance et je décide de travailler avec elle. Donc l’idée de départ, mon intention est vraiment de travailler avec Naomi, pas d’adapter son livre. Lors de notre rencontre subséquente, elle me dit “je ne fais pas ça du cinéma”. Je lui réponds “ça tombe bien moi j’en fait. Tu as le regard intérieur, donc tu me guideras, tu me présenteras des gens qu’on incorporera au film. Et moi je me chargerai de tout ce qui entoure ça”.

Scénarisation

“Naomi m’invite chez elle à l’été 2012. Je vais quelques mois là-bas. J’avais un contrat de scénarisation, donc je me sentais obligée d’écrire. Sauf qu’on n’a rien écrit. On a rencontré des gens, on a été à la plage, on est allé chasser... bref, on a fait plein de choses, sauf écrire. Au final, je me rends compte que cette immersion a été nécessaire. J'avais tout à découvrir. Il me fallait vraiment un temps d’acclimatation. Par la suite, il a fallu quatre ans d’écriture, et trois refus de la SODEC, malgré des commentaires plutôt positifs. Le film a été écrit et récrit seize fois Il nous fallait convaincre les institutions à donner beaucoup d’argent pour un film avec des non-professionnels qui viennent d’une culture qu’elles ne connaissent pas. Je crois qu’il y avait des craintes sur la faisabilité de ce projet. “

Casting

“400 innus se sont manifestés. J’en ai personnellement rencontré 200. L’actrice principale, Sharon Fontaine-Ishpatao, est l’une des filles les plus timides que je connaisse. Elle s’était fait forcer la main par une amie... Quand je l’ai vue rentrer, j’étais persuadée que ça ne marcherait pas. Comme elle n’était pas à l’aise pour jouer, on s’est juste assises et on a discuté pendant une heure et demie. J’avais l’impression de parler à mon personnage! C’est une fille allumée, différente des autres, qui veut étudier à Québec... Dans le cas de Yamie, c’est tout le contraire. Elle voulait tellement le rôle! C’est une fille qui a du “torque”. Le travail a été de trouver des gens qui ressemblaient à leur personnage, mais de leur laisser un espace de jeu aussi...”

Tournage

“Trente-un jours de tournage, et à chaque jour j’ai un souvenir. Je me souviens que lorsque l’on tournait la scène de Mikuan dans le chalet sur la plage, il venait de neiger. Une grosse tempête... Les camions techniques ne peuvent pas descendre les caméras, les éclairages... à la dernière minute, la régie a lancé un appel à tous les hommes de Sept-Îles qui possèdent une motoneige pour venir nous aider. À 4h30 du matin, on est en haut de la falaise de Maliotenam, et là, un convoi d’hommes en motoneige arrive. Il fait encore noir, tout le monde vient de se réveiller, on a le café à la main. On embarque le stock pour une “ride” de 15 minutes avec tout l’équipement. Ce sont des québécois blancs, pas des innus. C'est ça qui était “cool”, il y avait de l’entraide entre deux communautés. La cohabitation est parfois difficile à Sept-Îles, mais il y a aussi de belles affaires qui se passent. Ce film, c’est est une. C’est une fierté partagée. Je le pense vraiment, même si ça peut paraître fleur-bleue, mais je suis encore plus fière du processus que du résultat. Le résultat c’est le film, et je l’aime bien, mais le processus a duré sept ans et a été enrichissant pour tout le monde.”

Montage

"J’ai quelque chose comme soixante heures de film, mais au final, je suis assez contente, 90% des scènes tournées ont été conservées. Le défi, c’était de la dentelle dans les scènes de dialogue. Je pense que la direction d’acteur, c’est beaucoup du fait du montage. Le montage peut faire mal jouer un bon acteur et vice-versa. Élever leur jeu - qui était déjà très bon pour des non professionnels -, et aller chercher une coche de plus pour enlever les fausses notes. Le montage a été très difficile à cause des deux blocs de tournage. Après le premier bloc on a monté pour aller chercher des sous, et avancer le projet... mais je n’avais pas tous les morceaux. Il me manquait le début et la fin du film, donc je n’avais pas vraiment le cœur au montage. Une fois qu’on a terminé le second bloc, on avait dépensé notre budget de montage, alors que tout restait à faire à mon avis. Je pensais prendre les rennes, mais je manquais de recul... Quand Amélie Labrèche est arrivée et m’a dépannée, je lui ai confié la fin du film, il restait un mois. Le film était à 40% d’avancement. Amélie a terminé le montage dans la chaise du capitaine. Elle a un grand talent de monteuse.”

Sortie du film 

“Je suis contente de voir les comédiens s’approprier le film à ce point. Ils étaient à Toronto et à Québec. Ils ont participé au tapis rouge, ils ont mis leurs beaux habits, ont donné des entrevues... C’était leur première fois! Et ils ont tous été très bons. Il n’y a rien qui me rend plus heureuse que de voir les comédiens prendre le film à leur compte. Naomi est très impliquée aussi. Plus ils se l’approprient, plus ça me fait plaisir. Maintenant, il faut déplacer les québécois en salle... On compte beaucoup sur le bouche à oreille. Je pense que c’est un film accessible et avec des émotions qui peuvent toucher tout le monde. Pour l’instant le buzz est bon!”

Myriam Verreault, a également coréalisé en 2008, À l'Ouest de Pluton
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